Un nouveau rapport de l'UICN signale que les scarabées bousiers font actuellement face à une perte importante d'habitats favorables. Celle-ci étant en particulier due à la disparition des pratiques agricoles traditionnelles, à l'abandon des milieux ruraux, et à la contamination chimique via des produits médicaux vétérinaires.

La première évaluation de la Liste rouge des scarabées bousiers méditerranéens de l'UICN, publiée aujourd'hui, compile les résultats d'une évaluation de 200 taxons de scarabées bousiers, dont 150 sont endémiques de la région. Cette publication affirme que 20% des espèces évaluées pourraient être en danger d'extinction, dont 21 sont des espèces endémiques. 

La publication est disponible ici https://portals.iucn.org/library/sites/library/files/documents/2020-046-En.pdf 

« Le résultat de cette évaluation de la Liste rouge confirme que les efforts visant à enrayer la perte de biodiversité dans la région doivent être intensifiés dans les années à venir pour maintenir les écosystèmes en bonne santé, et protéger notre capital naturel pour les générations futures. La conversion des prairies pour l'agriculture ou la sylviculture, le pâturage intensif, l’usage indiscriminé de produits médicaux vétérinaires et l'abandon de l'élevage sont des menaces importantes pour ces espèces. Des approches plus innovantes et intégratives sont nécessaires pour une agriculture plus durable dans la région », explique Antonio Troya, Directeur du Centre de l'UICN pour la Coopération en Méditerranée.

Le surpâturage, qui provoque la compaction du sol et modifie la structure de la végétation, ainsi que l'abandon de l'élevage - qui réduit la quantité de ressources trophiques (matières fécales), - font parties des menaces les plus critiques pour les bousiers méditerranéens. Notamment, le déclin des pratiques agricoles culturelles telles que la transhumance à travers l'Europe est susceptible d'augmenter la pression sur les bousiers.

De plus, l'utilisation généralisée de produits médicaux vétérinaires entraîne une contamination des excréments du bétail.  La difficulté de celui-ci à métaboliser la plupart de ces substances implique qu’elles sont relâchées à l’état naturel et elles affectent des espèces non ciblées telles que les bousiers. Par conséquent, il est nécessaire d'améliorer la législation existante en réglementant l'usage des produits médicaux vétérinaires utilisés contre les parasites, et de mettre en œuvre des mesures pour empêcher une mauvaise utilisation pouvant provoquer une contamination.

« La diversité des bousiers dans la région méditerranéenne est en grande partie liée à l'hétérogénéité du paysage, la variété des mammifères présents et la disponibilité d'excréments d'herbivores non contaminés. Une meilleure gestion des pâturages domestiques et naturels dans les paysages naturels et agricoles est essentielle pour conserver la biodiversité des sols et garantir des écosystèmes sains à l’avenir », ajoute Jorge Lobo du Département de la biodiversité et du changement climatique du Musée national des sciences naturelles d'Espagne. 

Le nouveau rapport souligne également le manque d’information disponible pour évaluer le risque d'extinction de 74 espèces, ayant été classées par conséquent « Données insuffisantes » (DD).

« Des groupes d'invertébrés hyper-diversifiés, tels que les bousiers, peuvent servir d'indicateurs de l’état de santé des paysages naturels perturbés et de leur biodiversité. Accroître les connaissances sur ces espèces nous aidera à comprendre où agir pour restaurer la santé des écosystèmes et les avantages associés. Ce dernier rapport de l’UICN montre la relation entre la diversité des coléoptères et les changements produits par l’homme. En particulier, ce rapport indique l’importance de s’intéresser à ce groupe d'espèces charismatiques pour étendre la perspective et représentativité de la Liste rouge de la biodiversité méditerranéenne » ajoute Ana Nieto, Directrice de l'Unité pour la Conservation des Espèces dans le programme mondial sur les espèces de l’UICN.

Un manque de protection juridique

Le rapport de l’UICN sur les bousiers méditerranéens souligne également l'absence totale de protection juridique pour ce groupe d'espèces. Celui-ci étant exclu des principaux instruments et cadres légaux tels que la directive Habitats de l'UE, la Convention relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de l'Europe, CITES et autres réglementations de l'UE sur l'utilisation de médicaments antiparasitaires.

De nombreux bousiers sont associés à des habitats naturels ouverts et à des paysages agricoles traditionnels avec des densités de population modérées. Ainsi, il existe de nombreuses zones où la riche diversité des bousiers se produit en dehors des zones protégées.

Leur statut de protection varie également d'un pays à l'autre. Même s’il existe des mesures de protection des espèces ou des écosystèmes, celles-ci se concentrent généralement sur la conservation de populations d'un petit nombre d'espèces ou de certaines zones naturelles de diverses manières. L’implémentation de politiques spécifiques est nécessaire pour souligner l'importance de préserver ou d'introduire des pratiques agricoles et des systèmes de pâturage du bétail qui garantissent une répartition hétérogène des habitats agricoles et naturels sains dans tout le paysage.

Les scarabées bousiers offrent un large éventail d'avantages environnementaux, ils contribuent aux cycles des nutriments, à l'aération du sol et à la réduction des émissions de dioxyde de carbone et de méthane, au contrôle des parasites et à la dispersion secondaire des graines. Ils sont également importants dans les réseaux trophiques, non seulement en tant que décomposeurs, mais également en tant que proies pour les oiseaux, les chauves-souris et autres animaux insectivores.

Cette étude, intitulée « L'état de conservation et répartition des bousiers méditerranéens » est le résultat d'une collaboration entre la Commission de sauvegarde des espèces de l'UICN, le Programme mondial sur les espèces et le Centre de coopération méditerranéenne de l'UICN.

Pour plus d'informations, des photos et des interviews, veuillez contacter lourdes.lazaro@iucn.org

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